Fanny Terno
Fanny Terno est née en 1992, à Monaco. Après une formation à l’École Supérieure d’Arts Appliqués Dupérré à Paris, elle étudie à l’École nationale supérieure de la photographie d’Arles dont elle sort diplômée avec les félicitations en 2018. Elle développe depuis 2019 son travail en croisant le champ de l’image avec celui de la mésologie (風土学) dans le cadre d’un doctorat de recherche-création à l’Université d’Aix-Marseille et l’ENSP d’Arles, en partenariat avec la Kyoto City University of Art au Japon où elle résidera entre 2020 et 2022.
Ses projets ont notamment été exposés à Kyoto (Galerie Yokai Soho, Institut Français du Kansai, Galerie Tomo), Tokyo (Centre d’art Spiral), en France (Institut Tenri, Rencontres d’Arles, galerie Le Magasin de Jouet, Fondation d’Entreprise Ricard), et Monaco. Elle a été lauréate du prix Olympus – ENSP en 2018, et de la bourse du gouvernement Japonais Monbukagakusho (2020-2022).
Une partie de son travail est co-produit avec l’artiste-chercheur Thomas Vauthier (Université Paris VIII) dans le cadre de leur structure collaborative Engawa.
«Mésologie de l’image, images de la mésologie»
Partant d’un constat de crise générale liée à l’anthropocène et à ses effets dans les domaines sociaux, environnementaux, politiques, représentationnels, il nous semble que le trouble de nos rapports au monde, à l’altérité et à l’art semble en être symptomatique. Il est alors possible de se demander si une écologie de l’attention (Citton) expérimentée à travers la pratique artistique et sa réception pourrait, au delà d’une médiation (représentation), proposer des re-médiations en tant qu’hypothèses artistiques de résiliences écologiques, sociales et mentales (Guattari). Cette recherche se situe à à la croisée de plusieurs champs disciplinaires (arts visuels, architecture, esthétique, philosophie, curation) autour de ce qu’il y a entre les choses, les êtres et en leur milieu, s’attachant à expérimenter des possibilités de méditer – littéralement, prendre soin de – la rencontre entre des habitants mitoyens d’un même milieu.
La méthodologie à l’oeuvre dans cette recherche réside dans la conjugaison de la mésologie avec le champ de l’image contemporaine, de sa pratique et de ses mutations. La mésologie (風土学, fūdogaku), entendue comme la science des milieux est en réalité plutôt une perspective générale et pluridisciplinaire. Son objectif est, selon Augustin Berque, de bâtir une alternative au paradigme occidental moderne classique. Ce dernier est caractérisé par le dualisme cartésien à travers une série d’oppositions qualifiant notre rapport au monde et à nous-même (objet et sujet, nature et culture, homme et animaux, etc.) et a pour conséquence d’abstraire l’humain de la terre (acosmie) de manière destructrice pour les espèces, les paysages, les cultures.
La symbiose des champs de l’image et de celui de la mésologie permettra des échanges et élaborations d’outils, de méthodologies d’analyses et de créations : nous envisageons de donner corps et action à la mésologie par le biais de l’image (images mésologiques) et de même, de penser et pratiquer méso-logiquement l’image (mésologie de l’image).
Le terrain d’éude et d’expérimentation – dont l’auctorialité sera en partie partagée avec l’artiste-chercheur Thomas Vauthier prendront place dans un espace-temps bien précis, à savoir une akiya (空き家) maison traditionnelle japonaise laissée à l’abandon à Onomichi, préfecture d’Hiroshima (Japon). Ce processus, de la restauration architecturale à son ouverture au public lors d’expositions et événements performatifs, en passant par son habitation, sera l’objet-sujet d’une captation élargie. En effet, sera mis en oeuvre l’élaboration simili-factuelle de récits audio-texto-visuels venant relater, sans s’y réduire, le processus de rénovation de l’akiya. Pour ce faire, deux formats seront employés : un scénario, récit prédicitif anticipant – sur un mode utopique – les situations qui pourraient advenir et un film, symptomatique de l’écart entre le scénario et l’advenir réel. Dans ce cadre, un dispositif de captation prototypique sera conçu. Il manifestera un intérêt prononcé pour des formes de laisser-faire, de dé-subjectivisation, notamment en développant une pratique d’images du milieu (mésogramme).